Nombre de messages : 490 Guilde : Deus Solaris Age : 33 Date d'inscription : 28/06/2010
MercenaireNombre de contrats: LuniaNombre d'animations: Nombre d'élèves: | Sujet: Sous la lune. Jeu 2 Mai 2013 - 2:18 | |
| Le soleil ne semblait pas décidé à se coucher, descendant trop lentement au goût de la jeune disciple de Iop qui le regardait avec ennui, se demandant encore combien de temps elle aurait à faire semblant qu’elle s’en intéressait. Sortie ce soir là accompagnée de son mari, elle s’efforça de lui sourire et de lui faire des signes de tête pour lui démontrer un certain intérêt à ce qu’il disait, comme elle l’avait appris.
Le ciel était à couper le souffle, d’une beauté terrifiante par ses couleurs étrangement criardes et glauques à la fois. Presque tous les habitants de cette contrée avaient le regard tourné vers lui, s’imprégnant de sa splendeur. Un homme se leva, s’étira de toute sa grandeur, créant une ombre sur son esclave pendant un instant, puis se pencha pour y ramasser sa chaîne. Décrétant qu’il en avait assez vu, il secoua sa fourrure et avança vers les montagnes.
Ayant inventé un prétexte pour partir, elle avança vers le village d’Amakna d’un pas lent, perdue dans ses pensées, posant un regard vide sur ce qui se déroulait autour d’elle. Un conflit avait éclaté entre un disciple de Sacrieur et un jeune Osamodas où plusieurs personnes attendaient avidement qu’ils sortent leurs armes, s’attendant à un spectacle ainsi qu’à un bain de sang. Tous ces regards passionnés pour si peu de choses donnèrent un pincement au cœur à la disciple de Iop, se demandant pourquoi elle ne pouvait rien ressentir de tel.
La montagne semblait paisible d’où ils étaient, mais une fois sur place l’esclave eu un frisson de dégoût en voyant les lieux. Le sol était jonché d’ossements rongés, de ronces métalliques montant le long des arbres fleuris aux feuilles de verres dont plusieurs s’étaient brisées au contact du sol. « N’est-ce pas magnifique? », l’homme était exalté devant cette vision. « On y voit ici la beauté et l’horreur de notre belle Arcadia ». La jeune esclave écoutait attentivement, marchant avec précaution entre les éclats de verre. « La douceur et l’amertume à la fois, la lumière et l’ombre, la loi et la liberté… Notre devoir et notre passion. Tu sais déjà que ces contrés sont construites avec les rêves et cauchemars de tous, changeant sans cesse au gré du temps, dont nous n’avons aucune notion. Cette montagne sera peut-être remplacée par un océan de rosée ou un désert de glace d’ici 20 minutes ou 20 ans, peut importe. Il faut profiter de sa présence maintenant. ». Il la traina un peu plus loin, balançant ses multiples queues à tout va, animé par la passion de ce qui se trouvait autour de lui. « Vient, j’ai quelque chose à te montrer. »
Il faisait déjà noir depuis un moment avant que la jeune aventurière s’en rendit compte, absorbée par le néant de ses pensées. Elle regarda autour d’elle, espérant trouver un repère pour savoir où elle se trouvait lorsque son regard se posa sur une grande bâtisse éclairée d’où provenait beaucoup de bruits. Elle reconnu la taverne d’Amakna et décida d’y entrer, espérant y trouver un peu de divertissement. À peine avait-elle franchit la porte qu’on entendit crier de l’autre bout de la pièce « Kynoa!! Vient donc nous rejoindre ! »
Après avoir marché pendant un moment, l’homme s’arrêta devant un tas de ronces montant aussi haut que les arbres, bloquant le passage. «Cela fait déjà trois de vos années terrestres que je t’ai avec moi Vixen, tu as bien changée depuis ton arrivée. Par contre, j’ai du mal à m’imaginer ce que tu as vécu, les Fée n’étant apparemment dotées d’aucune compassion et empathie, comme les gens de ton espèce le disent. Mais je crois que j’ai quelques explications à te donner avant de te montrer ce qu’il y a derrière ce mur de ronces. »
Elle avança lentement, cherchant la personne qui avait bien pu l’appeler lorsqu’elle vit une grande femme à la chevelure blonde lui faire un signe de main. Avec ses tatouages montant jusqu’à ses épaules et sa chevelure très courte pour un disciple de Sacrieur, Kynoa reconnu immédiatement son amie et s’avança vers elle. À en juger par le nombre de chopine et verres vides jonchant la table devant elle, elle se dit que Lunia et ses compagnons devaient être en état d’ébriété avancé.
« Tu sais, au début tu n’étais qu’un divertissement à mes yeux, mais les choses ont changé, c’est pour cela que j’ai des choses à te dire. » L’homme s’était assis et son esclave fit de même, enroulant ses queues rousses autour d’elle pour la réchauffer. « La Fée qui t’avais enlevée t’avais échangé contre quelques bricoles de valeur en ma possession, ce n’est pas commun comme échange déjà si tu te rappelle, mais je dois te dire que si les Fées ont une fixation sur les humains et sur les enfants surtout, c’est qu’eux même ne peuvent pas se reproduire. Elles enlèvent donc des enfants généralement pour combler ce vide. C’est d’ailleurs bien étrange qu’on t’ait enlevé aussi âgée, si je puis me permettre, bien que les enfants soient trop fragiles. Mais elle devait chercher une certaine marchandise à échanger probablement… »
Après s’être confortablement installée près de son amie, Kynoa se mit à écouter distraitement les déblatérations sans queues ni tête de ses compagnons. Elle se rappela sa rencontre avec Lunia, comment elle avait étudié les faits et gestes de la seule personne qui l’a approchée à son arrivée. Elle avait remarqué que son manque de réaction dérangeait les gens, elle avait donc minutieusement copié ce que les gens faisaient, une mine faussement triste à l’annonce d’une mauvaise nouvelle et un beau sourire accentué de quelques mots encourageants lorsqu’un bel homme venait raconter ses exploits qui, pour elle, étaient sans intérêt. Elle avait pratiquement tout appris en observant la femme à ses côtés qui, pour le moment, racontait l’histoire de sa peluche Nuggets qui avait été prise par son frère et qui l’avait probablement laissée à la porte d’un orphelinat qu’il avait incendié par le passé. Elle lui sourit.
« Les gens comme toi Vixen, on les appelle Changelin, ce sont des humains qui ont été enlevés par une Fée, parfois remplacé par un leurre, et qui ont grandit ou se sont transformés dans notre monde puis qui se sont échappés d’ici pour retourner dans le Monde des Douze. » L’esclave allait l’interrompre mais son maitre lui fit signe de se taire. « Derrière ces ronces se trouve la Haie, suit moi. » L’homme se leva, bougeant ses oreilles dans plusieurs directions, à l’affut du moindre son puis, par un malheureux miracle, s’engouffra parmi les ronces en y trainant sa prisonnière.
Après l’avoir longuement fixé d’un regard encore plus vide que celui de la disciple de Iop qui se trouvait en face d’elle, Lunia décida de tenter l’improbable et de se lever d’où elle était confortablement installée pour grimper maladroitement sur une table. Après avoir chancelé maintes fois, elle se redressa et porta bien haut la chopine qu’elle avait dans les mains. « Oyeeez, oyeeeeez! » Seules quelques personnes avaient arrêté leurs conversations pour regarder l’énergumène qui venait de signaler sa présence. « Si je dis « Oyez » ce n’est pas pour rien, ça veut dire que j’ai besoin de votre attention… Ou sinon dans des mots que vous pouvez comprendre ‘’Oyez’’ ça veut dire VOS GUEULES!! ».
La Fée semblait avancer aisément entre les ronces contrairement à son fardeau qui se tenait désespérément à la fourrure de son maître, s’accrochant, trébuchant, se heurtant contre toutes les ronces épineuses se trouvant sur son chemin. Il enroula ses multiples queues autour de sa protégée et la fit sortir de force de sa prison épineuse. Ils arrivèrent dans une petite clairière sombre où poussaient quelques arbustes. « Évite de toucher les épines la prochaine fois… ». L’esclave acquiesça en regardant l’état de sa fourrure et en ayant l’impression qu’elles lui avaient déchiré une partie de son âme par la même occasion. « Nous voici donc à la Haie, c’est le passage entre mon monde et le tien…Enfin… Tu n’y appartiens plus désormais, à aucun des deux d’ailleurs.... Tu sais, tu n’es plus complètement humaine désormais, tes yeux ont été ouverts sur un monde de rêves comme de cauchemars et bien qu’il puisse te sembler horrifiant par moments, ce monde reste un territoire où la magie et l’émerveillement sont présents malgré tout… Mais si je t’ai emmené ici… C’est que je veux que tu t’y échappe. »
Devant une telle autorité, quelques personnes supplémentaires avaient le regard rivé sur la personne plutôt éméchée qui se tenait miraculeusement debout sur une table. Bougeant sa choppe de bière au rythme de ses pensées, elle prit la parole après avoir prit une grande inspiration… «Je suis un jamboooon-booon-boooon, je pousseuuuuuh sous terreuuuuh et j’aimerais bien qu’un jouuuur on me déterr-Arg! » L’homme qui se trouvait auparavant à ses côtés avait décidé de se lever pour abréger les souffrances auditives que sa comparse infligeait aux gens présents en l’attrapant par les hanches et en la descendant de la table. « Pose toi le cul, on t’as assez vu comme ça… Et entendu aussi d’ailleurs. »
La jeune Changelin avait entendu des rumeurs sur des gens qui s’étaient libérés, après avoir défié leur maître, gagné un pari contre eux ou en ayant tout simplement échappé à leur vigilance. Elle avait aussi entendu des rumeurs à propos de ceux qui, une fois dans la Haie, avaient été rattrapés par leur maitre, trainés de force à travers le chemin tortueux des ronces pour retourner dans leur prison. On lui disait sans cesse de ne jamais croire une Fée, elles ne savent que jouer des tours, créer de faux espoirs pour ensuite avoir un malin plaisir à vous les détruire. Ceux qui se sont échappés ne le sont pas vraiment. Même s’ils sont loin de leur maitre, ils vivent dans la constante terreur que leur ancien geôlier les retrouve. Une fée ne laisse pas un Changelin s’échapper. Elle sait où il est. Elle n’attend que le bon moment pour retourner le chercher si celui-ci peut encore lui être d’une quelconque utilité. « Est-ce que vous voulez dire que je vous serait plus utile dans l’autre monde? »
Profitant de la confusion que son amie avait créée, la jeune Iop s’éclipsa hors de la taverne. Une fois à l’extérieur elle regarda la lune quelques instants puis, déjà ennuyée par ce qu’elle voyait, se mit à déambuler sans but vers le sud. Les maisons faisaient place aux enclos, puis les enclos à la forêt. La nuit était bien avancée, aucun bruit n’émanait de nulle part à l’exception des pas de l’aventurière, bien trop engloutie dans ses pensées pour regarder ce qui se cachait autour d’elle.
L’humanoïde eut un sourire en coin. « Tu pourras trembler, crier si tu le veux, tu frissonneras devant les horreurs que tu verras, les monstres déambuleront, voleront, ramperont mais tu ne pourras t’échapper, « Pourquoi? » pleureras-tu, « Pourquoi ne puis-je fuir? »… Simple, très chère… On n’échappe pas à son propre esprit. » Sur ces paroles, il repartit d’où il était venu, seul cette fois. Prise de panique, Vixen se mit à courir en direction du mur de ronce mais elle ne réussi pas à y passer le moindre doigt tant les ronces étaient devenues massives. Elle se retourna et n’eut pas d’autre choix que d’avancer dans ce qui semblait être un labyrinthe des plus inquiétants.
Kynoa releva la tête, à l’affut du moindre son. Elle chercha ce qui avait bien pu la tirer de ses pensées mais aucun bruit ne vint à ses oreilles. Un long frisson parcourra son échine, le silence était lourd et la lune était subitement masquée par des nuages passagers. Tous les sens en alerte et la main sur le pommeau de son épée, elle avança lentement en suivant son instinct, n’ayant aucun son pour la guider vers ce qui la troublait tant.
« Je tourne en rond, je n’y arriverais jamais ». Les ronces semblaient avancer en même temps que la petite Changelin, décidant du chemin qu’elle devait prendre. Une clairière devenait une impasse, l’impasse devenait un passage et une fois qu’elle l’avait franchit, il disparaissait aussi vite qu’il était apparu. Tournant maintes fois sur elle-même, elle chercha une issue qu’elle n’avait pas vue, un passage secret, n’importe quoi pour sortir de cet enfer. Soudainement, il y eut un rire. Un petit rire discret. « Ça y est, les monstres m’ont trouvé… ». Un passage s’ouvrir sur un petit homme aux cornes aussi tortueuses que les ronces qui l’entourait. Il s’avança en gambadant : « Que fais-tu ici petite? Tu t’enfuis? Une Fée t’a laissée sans surveillance et tu en as bien profité à ce que je vois. » Ne faisant que la moitié de la taille de la Changelin, il gambada joyeusement autour d’elle, faisant une jolie musique avec ses sabots en les frappant sur le sol. « Tu ne te rappelle pas quand tu es arrivée? C’est dommage, tu aurais dût mémoriser le chemin, ça t’aurait bien aidé! Mais tient, je te regarde depuis belle lurette, qu’est-ce que tu en as mit du temps avant d’arriver ici ! Moi je suis gentil, j’ai éloigné les bêtes et même que je vais faire plus pour toi, tu vois ce chemin? C’est par là que tu es arrivée! » Il la poussa sur les fesses vers le chemin qu’il indiquait. « Rapporte moi quelque chose de ce monde quand tu reviendras me voir, ça fait trop longtemps que j’y ai mit les sabots, j’aimerais bien un petit souvenir. Quand tu voudras revenir, frappe une surface plane en demandant qu’on te laisse entrer, poliment s’il te plait! Et un portail s’ouvrira, à toi de me retrouver ensuite.» Sur ce, les ronces se tassèrent sur un large trou et le Satyre y fit tomber sa comparse.
Une bête surgit d’un buisson et s’écrasa lamentablement sur le sol à ses pieds et tenta de se relever difficilement, Kynoa en profita pour la scruter un instant. Elle se retrouva face à face avec une lenald de sa taille, ce qui était déjà impressionnant, sauf que celle-ci possédait deux queues touffues et la fixait d’un regard mauvais. Elle n’eut pas le temps d’analyser que c’est cette chose qui avait causé son stress ultérieur que la bête lui sauta à la gorge, s’acharnant contre son cou jusqu’à ce que celle-ci lui brise la nuque.
Elle se releva et observa le corps de celle qui avait volé son identité pendant les trois années où elle avait été capturée. « Hé beh, on dirait bien que je n’aurais manqué à personne… » Le cadavre au sol se tordit, son ombre bougea, se plaça sous les pieds de sa réelle propriétaire et la magie de la Fée qui l’avait conçue s’envola dans un nuage de poussière argenté. Il n’y avait au sol plus qu’un tas d’objets informes avec lesquelles le leurre avait été créé, ficelles, morceaux de bois, feuilles et autres bricoles. La Changelin était bien décidée à reprendre la vie qui lui avait été volée, au même endroit où elle l’avait laissée. Elle fouilla la masse d’objets au sol pour y trouver les vêtements du leurre, les enfila et accrocha l’arme à sa ceinture. Vérifiant une dernière fois ce que la pile contenait, elle tombe sur une petite bague dorée. « Hé merde, une alliance… »
La vie avait continué sans elle, elle devait désormais la rattraper.
[L'univers Changeling est tiré du manuel "Changeling - The lost"] |
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